Read more" /> La Charte de l’environnement : un danger pour le droit constitutionnel français

La Charte de l’environnement : un danger pour le droit constitutionnel français

Dans un article publié dans le Journal des Libertés, hiver 2024, Jean-Philippe Feldman, professeur agrégé des facultés de droit, maître de conférences à SciencesPo et avocat à la Cour de Paris, analyse les implications juridiques et politiques de l’intégration de la Charte de l’environnement dans le bloc de constitutionnalité.

Le texte analyse de manière critique le projet de Charte de l’environnement adopté par le gouvernement français en 2003, intégré à la Constitution par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005. L’auteur, juriste isolé dans sa critique au sein de sa profession, souligne que cette réforme constitutionnelle consacre des principes qui, loin de renforcer l’État de droit, risquent de le miner profondément.

Le projet est né d’une impulsion politique, notamment du président Jacques Chirac, qui voulait inscrire le droit à l’environnement au même rang que les droits de l’homme de 1789 et les droits sociaux de 1946. La Commission Coppens, chargée de rédiger la Charte, a été principalement composée de non-juristes, ce qui a orienté le texte vers des objectifs plus politiques que juridiques. Malgré un encadrement juridique minimal, la Commission a adopté un texte assez consensuel, notamment en ce qui concerne le très controversé « principe de précaution ».

Le texte du projet modifie le Préambule de la Constitution pour y ajouter les « droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2003 ». Cette modification, présentée comme un simple enrichissement, est en réalité perçue par l’auteur comme une rupture grave dans la tradition juridique française. En effet, il dénonce l’introduction de faux droits, comme le « droit à vivre dans un environnement équilibré », qui ne repose pas sur une obligation clairement définie. Selon lui, ces droits ne sont que des aspirations vagues, transformées artificiellement en droits opposables, ce qui brouille la distinction entre droits-libertés et droits-créances.

L’auteur critique l’introduction de faux devoirs, tels que celui de « préserver l’environnement », considérant que la sphère du droit ne doit pas empiéter sur celle de la morale. Il reproche au projet de vouloir instaurer un ordre moral d’État, en imposant aux citoyens des devoirs que seule leur conscience devrait dicter.

La critique porte ensuite sur le principe de précaution, consacré par l’article 5 de la Charte. L’auteur y voit une logique profondément malthusienne et anti-progressiste, héritée des thèses de décroissance économique et de stagnation technologique. Ce principe, en supposant qu’une action potentiellement risquée ne peut être entreprise sans certitude absolue de sécurité, conduit à l’inaction et à l’immobilisme. En niant la prise de risque inhérente à toute avancée humaine, il empêche l’innovation et le progrès scientifique.

La Charte remet en cause le principe fondamental de responsabilité individuelle. En consacrant une forme de responsabilité collective — fondée non sur la faute, mais sur des risques présumés —, elle abandonne les fondements du droit civil. Ainsi, elle risque de transformer le droit en instrument idéologique au service du pouvoir politique, où ce dernier désigne les coupables en fonction d’intérêts moraux ou électoraux, au lieu de se fonder sur des critères juridiques objectifs.

L’auteur alerte sur le danger d’une propagande écologique institutionnalisée, prévue par l’article 8 de la Charte. En imposant l’« éco-citoyenneté » dans les programmes scolaires et universitaires, il s’agit selon lui de promouvoir une vision idéologique étatisée de la question environnementale, transformant l’éducation en outil de conditionnement.

La Charte représente une pollution juridique, scientifique et culturelle, sapant les fondements libéraux et rationnels du droit français.

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