L’hebdomadaire souverainiste de gauche ne comprend absolument rien aux fondements du libéralisme et à ses courants.
De manière générale, quand la presse française parle du libéralisme, le libéral se trouve partagé entre deux réactions : soit le contentement que l’on s’intéresse à ses idées, soit le désagrément de les voir massacrées. Telle a encore été notre ressenti à la lecture de l’article sur deux pages intitulé « Les libéraux. Au nom de la liberté, du marché et de la propriété », dans le cadre de la série d’été de l’hebdomadaire Marianne (21 août) consacrée aux « nouvelles familles d’intellos ».
Pourtant, l’article commençait plutôt bien avec une grande photographie d’Ayn Rand, la philosophe et romancière américaine. Mais le chapô particulièrement confus nous a immédiatement refroidi : « Qu’ils soient progressistes ou conservateurs, européistes (sic) ou nationalistes, productivistes ou décroissants… Les libéraux actuels ne s’entendent sur rien. Mais tous ont en commun leur foi profonde dans les vertus du marché ». Des phrases dénuées de sens, contradictoires et relativistes. Si les membres d’un courant politique ne s’entendent sur rien, il n’y a plus de courant politique… Par surcroît, nous avons, entre autres, du mal à comprendre comment une personne pourrait prôner le libéralisme, à tout le moins dans sa dimension économique, tout en étant en faveur d’une « décroissance » !
L’encart de la seconde page confirme la superficialité et l’inintelligibilité de l’article. Au titre des « figures principales » se trouve d’abord « la marraine », Ayn Rand, alors même que de nombreux libéraux ne partagent nullement ses idées (demandez à la plupart des disciples de la pensée autrichienne, jamais citée dans l’article au demeurant, un point de détail !) ; puis au titre des « poulains » (il va de soi que L’Iref n’est pas mentionné) Agnès Verdier-Molinier, dont le think tank est gentiment qualifié d’« ultralibéral », Gaspard Koenig et Laetitia Strauch-Bonart, la « libérale-conservatrice ». Quant à « la maison d’édition » des libéraux, il s’agirait de « L’Observatoire »… parce qu’elle a notamment publié Jacques Attali !
Quant au fond, l’article nous explique que « les libéraux sont partout et nulle part », une « ambiguïté originelle ( ?!) ». On comprend mieux que Marianne ne comprenne rien quand on lit un peu plus loin qu’Emmanuel Macron incarnerait un « libéralisme pragmatique » en reconditionnant ainsi la fable d’un Macron libéral qui nous est contée depuis son émergence à la vie politique et particulièrement son accession à l’Elysée.
Nous ne pouvons pas, dans un espace aussi réduit qu’une pendule, démonter toutes les énormités de l’article, mais, après avoir lu que « certains libéraux, comme le décroissant Gaspard Koenig, dénoncent eux-mêmes les dérives d’un marché livré à la loi du plus fort », une rhétorique à la Jean-Luc Mélenchon (un autre libéral sans doute ?), que la journaliste prétende que « les plus radicaux s’inspirent de Murray Rothbard », ce qui n’est pas faux, pour défendre entre autres un « État réduit », nous laisse songeur puisque Rothbard était bien évidemment anarcho-capitaliste, et non pas libertarien, et qu’il plaidait en faveur de la suppression totale de l’Etat.